Les bonnes manières recèlent davantage que les normes de civilité du modèle alimentaire à la française qui fonde le plaisir de manger sur le partage d'un repas à table. Elles opèrent une mise à distance de la fonction physiologique de manger en proposant des « plaisirs de table » en forme de savoir-faire qui atténuent les risques de rejet alimentaire (dégoût physique) et d'excommunication (dégoût moral). Y correspondent deux principaux apprentissages de la table dont les cantines sont investies auprès des jeunes mangeurs par les politiques nationales et municipales: « goûter à tout » et « bien se tenir à table », qui dessinent en creux la figure du jeune convive.

Antidote au dégoût moral, l'élévation se trouve aussi placée au centre de l'expérience de table par des acceptions religieuses, gastronomiques et cliniques. Notre objet se travaille donc à l'intersection des conceptions du plaisir hédoniques (auto-efficacité du mangeur : accompagnement ludique aux plaisirs gustatifs, initiatique en cas de phobie) et eudaimoniques (auto-efficacité du convive –couper sa viande, passer le pain, envie de dire merci, connaître les cuisiniers– vers un sentiment d'appartenance à la table et au-delà).

Les dimensions intra et interpersonnelles relatives à ces dernières au cours des apprentissages et pour lesquelles 500 enfants de 8 à 11 ans se sont auto-évalués en fonction de leur repas de cantine de la veille ont été articulées à un travail de terrain. Il apparait que la place centrale accordée à l'hygiène, la sécurité et la cadence des services coïncide avec la mise en retrait du bien-être et des apprentissages quand les équipes manquent d'outils pour accompagner concrètement l'enfant à investir la place de convive qu'on ne cesse pourtant de lui demander d'occuper. Seront présentés des éléments de l'intervention bâtie à partir des résultats et visant à activer le dispositif matériel et organisationnel des cantines par des gestes et langages propres à favoriser les sentiments d'auto-efficacité et d'appartenance des jeunes convives.

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